Les paradoxes des vacances d’été à la française
Cette année plus que les précédentes, les tendances pour la France sont marquées par des paradoxes : budget serré, envies d’ailleurs, conscience écologique… les Français jonglent entre contraintes et désirs. Leurs intentions de voyage dessinent un tableau contrasté.
Bien qu’inquiétés par le contexte géopolitique, ils sont toujours nombreux à envisager de partir à l’international. Toutefois, leur penchant pour les vacances domestiques n’a pourtant pas d’égal chez nos voisins européens. Confrontés à des contraintes budgétaires, les Français restent les champions européens des longues vacances. Sensibles aux enjeux environnementaux, ils peinent toutefois à intégrer l’écologie dans leurs choix.
Une saison sous le signe du paradoxe…à la française.
Enseignements clés pour la France :
…et conscience écologique en berne
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LE MONDE INQUIETE MAIS CONTINUE DE FASCINER
Dans un contexte mondial incertain, la sécurité devient un critère majeur dans le choix de destinations des Français.
En deux ans, le risque de conflit armé a vu son importance croitre de manière significative, avec 56% des Français ayant l’intention de voyager considérant ce facteur essentiel dans le choix de leur destination, soit une hausse de 13 points par rapport à 2024, et de 42 points par rapport à 2023.
Un critère suivi de près par le risque terroriste (47%, +13 pts), le risque d’attaque personnelle (45%, + 8 pts) et le risque de troubles sociaux (30%, +7 pts), qui deviennent tout autant des facteurs déterminants cette année.
L’influence croissante de critères géopolitiques est particulièrement intéressante lorsque l’on affine l’analyse. Au-delà des zones de conflits armés en cours, le climat politique d’un pays de destination est devenu essentiel pour 39% des voyageurs français, en hausse de 6 points vs 2024 et 12 points vs 2023. Parmi ceux pour qui ce critère est important : 10% citent les Etats-Unis comme un pays qu’ils pourraient envisager d’éviter pour des raisons politiques (+ 8 pts). Ce pays se classe en 3e position derrière la Russie (15%, - 2 pts) et l’Ukraine (11%, =).
La géopolitique s’invite donc de plus en plus dans les bagages des Français… Bien que les préoccupations augmentent, ce sentiment ne se traduit pas systématiquement par une diminution des intentions de voyages vers les destinations perçues comme à éviter. On le constate pour les États-Unis, où on ne mesure aucun déclin significatif dans le choix réel de cette destination (4%, +1 vs 2024).
Malgré les inquiétudes, les Français affichent un engouement record pour les voyages cette année.
En effet, 82% des Français se disent enthousiastes à l’idée de voyager cette année, une augmentation de 5 points par rapport à l’année dernière, et proche de la moyenne européenne, qui atteint 81% pour la première fois.
L’enthousiasme est particulièrement marqué chez les jeunes, avec 91% des 18-24 ans exprimant leur envie de voyager, dont 47% qui se disent très enthousiastes. Les autres tranches d’âge partagent également cette excitation : 83% des seniors (65 ans et +) expriment leur désir de partir et 23% se déclarent très enthousiastes.
Cette envie se traduit par un record historique des intentions de départ entre juin et septembre : 82% des Français prévoient de voyager cet été, le plus haut niveau enregistré depuis 2015 (moyenne Européenne 79%), plaçant la France parmi les pays européens les plus enclins à voyager, après l’Italie (86%) et à égalité avec le Royaume-Uni, la Pologne et la République Tchèque. Cette tendance se retrouve en Europe, avec les plus hauts niveaux d’intentions de départ jamais enregistrés dans le baromètre.
Les périodes de vacances préférées des Français sont les mois qui s’étalent de juin à septembre (scores respectivement de 32% pour les mois de juin et juillet, 35% pour le mois d’août, 37% pour septembre1). A contrario, les périodes les moins plébiscitées sont les mois de novembre (3%) et de janvier (4%). Les mois printaniers, tels qu’avril et mai, constituent une alternative intéressante, attirant 19% et 27% des Français respectivement. |
ENTRE ENVIE DE FRANCE ET APPEL DU MONDE
Historiquement, les Français figurent parmi les vacanciers européens qui privilégient les séjours dans leur propre pays.
En effet, deux tiers des Français ayant déjà choisi leur destination (67%, -1 pt) prévoient de voyager en France, contre seulement 44% des Européens qui voyageront dans leur propre pays. Parmi eux, plus d’un tiers (36%, -2 pts) souhaitent rester uniquement dans l’hexagone durant toutes leurs vacances d’été.
Lorsqu’ils optent pour des vacances en France, les Français se tournent principalement vers les régions PACA (26%, + 1 pt), Bretagne (22%, + 6 pts) et Occitanie (22%, + 1 pt) qui demeurent comme l’année dernière les destinations françaises les plus prisées. Les habitudes jouent un rôle-clé dans le choix de ces destinations : 44% de ceux qui partiront cet été sont motivés par le fait de retourner dans un lieu qu’ils connaissent déjà (+ 7pts).
Par ailleurs, la mer reste le cadre de vacances préféré de deux tiers des Français (65% +3 pts, au même niveau que la moyenne européenne à 63%). En revanche, la campagne (25%, +2 pts), la montagne (23%, +1 pt) et la ville (22%, +4 pts) sont moins plébiscitées. S’il est possible de profiter de vacances à la mer dans d’autres pays, la France avec ses trois fronts littoraux et bénéficiant d’un climat favorable continue de séduire ceux qui choisissent de passer leurs vacances dans leur pays d’origine (le climat est la deuxième motivation pour 38% des voyageurs pour choisir leur destination). Il est également à noter que la Bretagne émerge comme une destination de plus en plus attrayante pour les voyageurs français, affichant une progression continue des intentions de s’y rendre durant l’été depuis 2021 (+7 pts).
En miroir, la France demeure une destination très prisée pour les visiteurs étrangers, notamment ceux des pays frontaliers. L’Hexagone se classe en tête des destinations choisies par les vacanciers belges et américains, et figure dans le Top 3 des destinations des touristes britanniques, espagnols, portugais, italiens et suisses. |
Près de deux tiers des Français ayant déjà fixé leur destination comptent passer au moins une partie de leurs vacances à l’étranger (64% vs 81% en moyenne pour les autres Européens). Ces intentions de départ à l’étranger pour les vacances d’été ont très fortement progressé ces dernières années (+12 points versus 2023, +19 points depuis 2017). Ainsi, malgré une appétence historique aux vacances en France, il est clair que les Français souhaitent de plus en plus se rendre hors de leurs frontières pendant l’été. Un tiraillement entre une envie de familiarité et de dépaysement, ce qui s’illustre sans doute dans la façon dont les Français envisagent leurs vacances idéales, leurs principales aspirations étant de se réunir en famille ou entre amis (56%), se détendre (47%), explorer la nature (55%) et découvrir de nouvelles cultures (36%).
En termes de destinations étrangères, l’Europe du Sud reste une valeur sûre : l’Espagne (23%, -1 pt), l’Italie (21%, +4 pts) et le Portugal (11%, +4 pts) restent les trois pays les plus envisagés pour cet été. On constate néanmoins une augmentation des intentions de se rendre hors Europe : Asie 10% (+3 pts vs 2024, +6 pts vs 2017), et Afrique 11% (+5 pts vs 2024 et +6 pts vs 2017) en particulier grâce aux pays du Maghreb.
A noter que les vacanciers français de moins de 35 ans sont ceux qui voyageront le plus à l’étranger (81% à l’étranger versus 59% dans l’hexagone), tandis que les séniors de plus de 55 ans privilégient davantage les séjours en France (53% à l’étranger et 78% en France).
Concernant les nouvelles tendances de voyage, les Français se montrent un peu plus réceptifs que leurs homologues européens à l’idée de se rendre vers des destinations « moins touristiques » (78%, +3 pts, contre 68% en Europe), de pratiquer le tourisme « slow » (78% +2 pts, 68% en Europe), ou encore de prendre part à des séjours culinaires (44% stable, 35% en Europe).
MALGRE LA PRESSION FINANCIERE, LES FRANÇAIS SONT LES EUROPEENS QUI COMPTENT PARTIR LE PLUS LONGTEMPS
Cette année, 18% des Français déclarent qu’ils ne partiront pas en vacances cet été. Les raisons financières restent la principale cause de cette décision : près de la moitié des non-voyageurs (47%, -8 pts vs 2023) affirment ne pas pouvoir se le permettre, tandis qu’un quart (28%, -3 pts vs 2023) souhaite faire des économies.
D’autre part, le budget alloué par les Français à leurs vacances s’établit cette année à 1774 €2, en très légère baisse depuis 2023 (-35 €, soit -2%) et largement inférieur à la moyenne européenne de 2 080 €. Les Français sont d’ailleurs moins nombreux que leurs voisins européens à déclarer que leur budget vacances va augmenter cette année avec seulement 36% contre 47% au niveau européen. A noter que le budget déclaratif des femmes est environ 25% plus bas que celui des hommes (1 510€ pour les femmes vs 2 060€ pour les hommes).
Toutefois en dépit de leurs contraintes financières, les Français sont paradoxalement les Européens qui comptent partir le plus longtemps cet été, avec une durée moyenne de 2,1 semaines (ex-aequo avec la Suisse, contre 1,9 semaine pour la moyenne européenne).
Cette capacité à sécuriser leurs 2,1 semaines de congés s’explique par des choix d’hébergements spécifiques : 27% des voyageurs français optent pour un hébergement gratuit, que ce soit chez des proches ou en famille, ce qui représente le niveau le plus élevé en Europe. En revanche, 40% seulement choisissent l’hôtel, le taux le plus bas parmi les pays européens, contre 65 % au Royaume-Uni et 72% en Autriche. Les Français restent en tête pour la location d’appartements ou de maisons de vacances (42%, +5 pts vs 30% des Européens) et pour le camping (15%, = vs 10% des Européens).
IMPACT ENVIRONNEMENTAL : ENTRE BONNE VOLONTE ET INACTION
Une majorité de voyageurs français déclare vouloir adopter un comportement responsable pour éviter de gaspiller les ressources locales (84%, -3 pts), soutenir les économies locales (81%, -2 pts), voyager en basse saison (75%), ou encore utiliser des moyens de transport à faible émission de carbone une fois sur place (71%). Cependant, l’empreinte écologique est l’un des derniers critères pris en compte lorsqu’il s’agit de choisir une destination, mentionnée par seulement 18% des répondants (+1 pt).
Bien que 4 Français sur 10 déclarent que l’impact écologique du voyage influence leur désir de voyager, cette préoccupation montre un recul depuis 2 ans (39%, -10 pts vs 2023).
Les Français sont de moins en moins nombreux à envisager de réduire leur empreinte carbone en choisissant des destinations plus proches (66%, -6 pts vs 2024), une tendance également observée au niveau européen. Ce constat met en lumière un comportement paradoxal, révélant un écart marqué entre une volonté de principe et les décisions concrètes des voyageurs.
Ce recul des préoccupations écologiques s’observe également dans les modes de transport envisagés pour les vacances. Cette année, 34% des Français prévoient de prendre l’avion, en hausse de +9 points, bien qu’ils restent moins adeptes de ce moyen de transport que leurs voisins européens où le taux atteint 50%. La voiture demeure le moyen de transport privilégié en France, utilisée par
65% des voyageurs, contre 55% en Europe. Le train (24%, +8 pts) et le bus (7%, +2 pts, derrière les Européens 12%) gagnent également en popularité.
Si l’empreinte carbone du voyage apparaît comme moins prioritaire, les conséquences du changement climatique font bien partie des préoccupations des voyageurs français. En effet, le risque de catastrophes naturelles est nettement plus présent dans les esprits cette année (36%, +10 pts), un phénomène qu’on retrouve également au niveau européen.


Méthodologie : l'édition 2025 du Baromètre annuel des vacances d'Europ Assistance et d'Ipsos a été réalisée dans 23 pays : États-Unis, Canada, Royaume-Uni, Italie, France, Espagne, Suisse, Allemagne, Autriche, Portugal, Belgique, Pologne, République tchèque, Arabie Saoudite, Émirats Arabes Unis, Inde, Singapour, Hong-Kong, Japon, Malaisie, Australie, Corée du Sud et Nouvelle Zélande. Pour chacun de ces pays, un échantillon représentatif de 1000 individus âgés de 18 ans et plus, constitué selon la méthode des quotas (sexe, âge, profession) après stratification par région et par taille de ville, a répondu à un questionnaire en ligne. L'enquête a été réalisée du 24 février au 26 mars 2025 et a porté sur les projets de vacances et les préférences en matière de voyage.
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1Il s’agissait d’une question à choix multiple, c’est la raison pour laquelle le total est supérieur à 100%.
2Base d’un foyer moyen de 2.5 personnes en France soit une moyenne de 825€ par personne. Un foyer est l’ensemble des personnes de la famille qui sont concernés par le budget vacances énoncé par le répondant. Durée moyenne des Français : 2.1 semaines
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